Le Conseil national des finances publiques (CNFP), institution indépendante chargée d’évaluer les finances publiques du Luxembourg, a adopté lors sa réunion du 9 novembre dernier son « Evaluation des finances publiques », préparée à l’occasion du projet de budget pour 2016 et du projet de loi de programmation financière pluriannuelle pour la période 2015 à 2019 (LPFP 2015-2019).
Comparée aux conclusions que le CNFP avait tirées en juin dernier au sujet du Programme de stabilité et de croissance pour la même période 2015-2019, la présente évaluation dégage des perspectives financières moins favorables. Alors qu’il y a 5 mois seulement le CNFP se limitait à dire que le respect des règles budgétaires serait loin d’être assuré à moyen et à long terme, il conclut désormais qu’il existe un risque que la règle concernant le solde structurel et son respect de l’objectif à moyen terme de +0,5% du PIB ne soit plus respectée dès 2015 et que l’écart par rapport à cet objectif devienne suffisamment important dès 2016 pour déclencher le mécanisme de correction au titre de la loi du 12 juillet 2014.L’élaboration de cette évaluation des finances publiques se fait à un moment où le fonctionnement du CNFP reste marqué par l’insuffisance de ses ressources humaines face aux missions légales qui lui incombent. Comme les difficultés rencontrées sont largement dues aux imprécisions de la loi du 12 juillet 2014 relative à la coordination et à la gouvernance des finances publiques, le CNFP a transmis aux autorités une proposition de modification de la loi qu’il espère voir entrer prochainement dans le processus législatif.
Ces conclusions reposent sur l’analyse que le CNFP a réalisée en appliquant la même méthode de calcul pour le solde structurel que celle adoptée dans la précédente loi de programmation financière pluriannuelle d’automne 2014, permettant de la sorte d’apprécier l’évolution des chiffres budgétaires dans le temps. Il n’en reste pas moins que les conclusions sous-jacentes continuent à être sujettes à d’importants aléas méthodologiques.
Vu la complexité de cette question de méthodologie, le CNFP propose dès lors de rassembler dans un groupe de travail les experts des institutions impliquées pour essayer de s’accorder sur une approche commune qui serait appliquée par tous les intervenants pour la détermination du solde structurel. Le débat sur l’évolution des finances publiques est effectivement trop important pour dépendre du choix de la méthodologie adoptée.
Dans le cadre de son évaluation, le CNFP a également procédé pour la première fois à un examen détaillé des règles de forme à respecter par la LPFP 2015-2019. Sur les 12 règles examinées, 5 ont été considérées comme étant conformes, 3 partiellement conformes et 4 non conformes. La liste des points considérés comme non conformes à la loi se lit comme suit :
- la non-prise en compte du coût d’acquisition de l’avion A400M au titre de l’exercice budgétaire 2019 suivant les normes de comptabilisation européennes applicables (SEC) ;
- l’absence d’une inscription dans la loi de plafonds pour les dépenses de l’administration centrale ;
- le manque de transparence concernant les calculs sous-jacents pour le solde structurel, et
- les explications trop succinctes concernant l’effet que les politiques envisagées sont susceptibles d’avoir sur la soutenabilité à long terme des finances publiques.
Suivant le principe du « comply-or-explain », le CNFP propose que cette évaluation soit prise en compte dans le cadre de la procédure budgétaire en cours ou bien que les autorités s’expliquent publiquement pourquoi ils auraient choisi de ne pas suivre l’avis du Conseil.
Le CNFP procédera à sa prochaine évaluation des finances publiques luxembourgeoises au cours du printemps 2016 à l’occasion du Programme de stabilité et de croissance pour la période 2016-2020, voire du nouveau projet de loi de programmation financière pluriannuelle portant sur la même période, au cas où le dépôt de ce dernier sera effectivement avancé au printemps.